RETOUR DE MA CORNEILLE, N’EN DÉPLAISE…

 

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L’un de ces quatre matins, veille de la Saint-Valentin, en train de petit-déjeuner tout en lisant les nouvelles sur ma tablette, jetant de temps à autre un oeil à la fenêtre, attendant discrètement, j’ose dire nonchalamment, le moment de la visite des oiseaux (mésanges, pic-bois, juncos, geais bleus), ou celle de mes quatre faons échevelés pour avoir dormi la tête dans la neige.

Je lance soudainement, pour que l’homme et les quatre murs de la maison l’entendent: « ma corneille » Et je tempère en ajoutant par prudence: « si c’était elle, si c’était ma corneille, celle-là même que je tentais d’apprivoiser l’été dernier? » Je me précipite vers la fenêtre, l’ouvre et lance dans le ciel et à tout venant mon « gouack gouack gouack gouack » devenu légendaire. Aucune ressemblance avec le croassement rauque et discordant de ma corneille, cette espèce de grands passereaux de la famille des Corvidae, présents en Amérique du nord et au Québec.

L’homme de ma vie en a entendu d’autres. Il ne s’étonne plus. Aussitôt il me tend une bouchée de son croissant au cas « Zou » la bestiole ailée reviendrait.

Pour ajouter au suspence, en dépit de mon enthousiasme, je confie au scepticisme de ma moitié: « je croirai qu’elle est ma corneille, si elle m’entend et vient déposer son ramage et son plumage à l’endroit où elle atterrissait fidèlement l’an passé, dans un grand fracas d’ailes.

Le temps de deux ou trois gorgées de café et voilà de nouveau l’oiseau rare qui dépose ses deux ergots sur la « rampe de la galerie » à ma grande joie. Elle reluque vivement autour et de son oeil aussi noir que son plumage iridescend, me jette un regard que je n’arrive pas à décrire mais qui n’a rien de la langueur de celui de mes biches.

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C’est elle! c’est elle! Dans un cri de joie. J’ouvre la fenêtre et dépose tout doucement le croûton dans la boîte à fleurs. C’est l’hiver vous comprendrez. Elle a compris. Elle scrute les alentours, s’approche à son tour de la fenêtre pour saisir l’appât, repartir au vol et aller se percher sur son piquet de clôture favori. Je suis aux anges. Ma corneille est de retour. Ce sera bientôt le printemps.

Note: (La corneille d’Amérique est protégée par la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs. C’est une espèce grégaire.

Les corneilles sont les seuls corvidés à effectuer une migration. À la mi-octobre, elles partent en bande vers le sud du Canada, le sud des États-Unis et le nord du Mexique. Celles qui trouvent suffisamment de nourriture peuvent rester à la même place toute l’année. Les migratrices annoncent leur retour entre la fin février et la fin mars.)