L’ART DE VIEILLIR…

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« L’art de vieillir consiste à conserver quelques espérances » 

Vous êtes au supermarché. Vous êtes à l’aise dans ces sortes de grandes surfaces, où il y a de tout. De la carte de souhaits au gigot d’agneau, de la baguette de pain à l’ail, au papier hygiénique; en passant par les bijoux, les appareils photo, les chaises de jardin. Il y a de tout, et plus encore, jusqu’aux robes de «bal de graduation» (en saison) pour vos pitchounettes.

Un vendredi soir, comme des centaines de moutons de Panurge, vous vous retrouvez dans ce vaste espace de rêves et d’abondance.

Vous avancez à petits pas. C’est le côté magique du lieu qui vous attire. Au bout de l’allée des friandises  et toutes espèces de sublimes gâteries, surprises!  Vous n’en croyez pas vos yeux. C’est bien le doyen de votre groupe de skieurs.  Sans crier gare, vous l’interpellez haut et fort pour ne pas le perdre de vue, comme s’il était seul, pour vous rendre compte que la moitié des acheteurs au comptoir de fromages se retournent vers l’homme, qui à son tour vous aperçoit. Un monument de taille ne ferait pas plus d’effet, « l’armoire à glace », pour reprendre l’expression, le copain skieur qui vous dit « je te suis » pour mieux vous dépasser au premier virage. L’athlète invulnérable, médaillé seize fois, le danseur qui aurait fait rougir Fred Astaire. Il est là à deux pas de vous, les mains rivées à son panier.

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 Qu’a-t-il de plus que les autres pour recevoir une telle attention? Quatre-vingt-douze ans bien sonnés,  droit comme un chêne, souple comme un roseau, jovial, enjoué,  respectueux et par surcroît,  bel homme notre nonagénaire. De cette beauté qui se mérite avec le temps qui passe.  

Je « reluque » son chariot et me demande ce qu’il fait ici.  Dans le panier d’épicerie, six chandelles d’ambiance et une bouteille de vin. « Des fois que quelqu’un s’arrêterait chez moi. J’aime recevoir ».

Ce soir-là, c’est le souper anniversaire à la « Résidence » et le connaissant depuis des lunes, je suppose qu’il ajoutera sûrement  une gerbe de fleurs qu’il offrira à une dame parmi celles à qui il aura offert le plaisir d’une danse comme au temps de sa jeunesse.

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Notre skieur de haut niveau, élu au Temple de la Renommée du Ski Canadien (Le Temple de la Renommée du Ski Canadien souligne les accomplissements des personnes remarquables qui ont excellé et/ou ont grandement contribué à l’avancement des sports de glisse.), médaillé seize fois et membre de « Ski Bon Âge » nous a quittés le 30 juin dernier, à l’âge de 93 ans.

 « C’est grand la mort,  c’est plein de vie dedans »

Félix Leclerc ».    

 

 

UNE HISTOIRE DE PÊCHE

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Pas dans un lac caché au fond des bois, favori des pêcheurs aguerris comme l’est ma digne et privilégiée cousine Denise. Pas sur les bords  d’une rivière tumultueuse qui favorise le fabuleux lancer à la mouche comme seul, mon beau-frère sait le faire. Non!

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 Dans une spectaculaire « Pourvoirie », tout confort, rien de moins. Tout ce qu’il y a de plus (talons aiguilles) pense mon petit- fils en décrivant l’endroit: Voiturette de golf pour transporter gréements et pêcheurs vers les lieux rêvés; chaloupes spacieuses qui vous attendent au quai, lacs à volonté dans lesquels foisonnent les truites gourmandes mouchetées ou arc-en-ciel. Bref une journée de rêve à rêver les yeux ouverts pour reprendre l’expression.

Pour avoir eu à l’oeil mon « martin-pêcheur » s’affairer aux préparatifs, on a beau dire, il reste que se préparer pour une excursion de pêche  n’est pas une mince affaire. Il lui aura fallu un bon moment sans que je précise la durée pour rassembler l’arsenal diaboliquement enchevêtré, dans les multiples coffrets de pêche remisés depuis des lunes. Cuillers métalliques de formes, de tailles et de couleurs variées; mouches pour experts,  au cas zou;  hameçons en quantité industrielle; moulinets. Et j’en passe. C’est étonnant ce que peut contenir un coffret de pêche. C’est comme une boîte de boutons à coudre. J’ai appris avec le temps que celui dont on a besoin n’est jamais là. Pour le pêcheur et compagnie, tout  est prêt  bien avant l’heure du départ y compris l’huile à mouche. Même le GPS est déjà programmé pour nous mener à bon port sans oublier son Agrippine à la voix suave. (Dans 500 mètres, tournez à gauche puis à droite) Je l’ai maintes fois répété : elle me tombe sur les nerfs. Nous n’arrêtons pas le progrès direz-vous. D’accord!

Pour la pêche, à ce jour, nous avons dépisté deux adeptes inconditionnels : Sinead et William. Invitation lancée, invitation acceptée sans hésitation de la part des deux G3. (3e génération). C’est un départ!

 Deux heures quinze minutes sous un ciel sans nuages et route panoramique d’une beauté sans fin. Vingt minutes pour un accueil chaleureux et cordial de la part des membres de la « pourvoirie; « Briefing » de circonstance pour les besoins de la cause. Nous voilà Sinead, William et les grands-parents assis dans la spacieuse chaloupe. On nous a même indiqué sur une carte, quelques petits endroits de prédilection. La pêche sera bonne. Les truites nous attendent, ce n’est pas peu dire!

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De son œil de lynx, n’écoutant que sa mémoire, la grand-mère (moi) s’offre le plaisir de proposer l’endroit précis ou jeter l’ancre, grâce à une leçon de pêche 101 intitulée « où se cachent les truites » dispensée par son regretté beau-père, un pêcheur invétéré. La leçon porte ses fruits. Un jour, elle a  même décroché le trophée tant convoité de la prise de la plus grosse truite au sein d’un groupe de pêcheurs journalistes membres d’un magazine spécialisé, à l’occasion d’une excursion de pêche. On ne rit pas.

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Une fois l’ancre jetée, ce que l’homme de ma vie n’a pas prévu: c’est l’ardeur qu’allaient mettre nos deux mousses à sortir les poissons grâce aux astuces transmises secrètement par l’éminent  guide de la pourvoirie. Et vas-y grand-père, c’est presque la pêche miraculeuse. Le temps de poser le vers bien dodu sur l’hameçon, de descendre la ligne à l’eau, attendre que la pitchounette morde et  hop là! Notre Saint-Pierre fait le reste. Le reste c’est dans l’embarcation que cela se passe.

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Le Saint-Pierre (patron des pêcheurs), si j’ai bonne mémoire (l’homme dans les circonstances )épuisette en main, il a beau être agile, il lui en faudrait deux pour suffire à la demande des trois pêcheurs qui semblent ne pas avoir une minute à perdre. Le temps d’enfiler un ver et de lancer la ligne à l’eau et c’est reparti de plus belle.

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Si vous me demandez de résumer notre journée?  Je réponds fantastique, inoubliable et mémorable à cause des anecdotes et du plaisir d’être ensemble à partager une expérience formidable. 

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Je vous invite à deviner le poids de la plus grosse truite pêchée?

Combien en avons-nous pêché à nous quatre?

Soyez assurés que je serai enchanté de lire vos réponses. 

UN SOUFFLE DE VIE

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Une tige interminable, quelques feuilles, une minuscule fleur qui regarde la lumière, un fruit à peine perceptible (la pièce de monnaie). Voilà ma seule et dernière lunaire: Lunaria Rediviva,( lunaire vivace).Affectueusement appelée: monnaie-du-pape.

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La présence au bercail de cette jolie plante, appréciée des fleuristes, remonte à1958. En se propageant allègrement, elle a tôt fait de régner en maître à l’époque. Pouvez-vous croire que depuis plus de soixante ans, fidèlement,  ma «monnaie-du-pape » de la famille des crucifères occupe une place de choix dans l’espace « jardin d’autrefois » composé de cœurs saignants, d’hortensias, de lanternes chinoises et d’hémérocalles.

Cette année, à mon grand étonnement,  je  n’ai  retrouvé qu’une seule lunaire en fleurs et en feuilles qui a survécu aux assauts de l’hiver. «Je me dois de sauvegarder et protéger la petite chérie, porteuse des éphémérides de la tribu. Il en fallut de peu pour que ma «résiliente» disparaisse à tout jamais. Un souvenir vieux de 60 ans, que m’offrit Évelyne, ma voisine. En ce temps-là, le printemps venu, les nouveaux arrivants que nous formions dans le patelin, échangions de jeunes plants ou des graines de semence pour enjoliver rocaille, jardinet, platebandes.

Ma lunaire déracinée, « esquintée » dans le transport vers le refuge, allant jusqu’à perdre sa tête fleurie, n’est plus qu’une longue tige dépouillée de ses atours.

Morale de l’histoire! Il m’aura fallu voir surgir ce petit souffle de vie. Cette toute petite chose obstinée à occuper sa place au soleil, pour que je me réapproprie le temps qu’il faut,  un temps qui n’a pas son pareil pour vous adresser une note, vous raconter et vous rappeler que je pense à vous tous.

Je vous souhaite un agréable mois d’août en perspective.