Notre Christian s’est fait passer un savon. Son aventure nous a valu une note fabuleuse et captivante. La lecture de ce récit m’a rappelé un article intitulé « La savonnerie domestique » (revue Fermières 1942, édition épuisée) reproduit en février 1978 à la demande de nombreuses lectrices afin de répondre à un nouvel engouement pour le « savon du pays »
« Nous jetons tous les jours la graisse des aliments et au prix que coûte le savon, peut-être pourrions-nous l’utiliser? Nous suggèrent-elles.
Présentons-le: c’est le savon domestique dont la couleur, pour ne pas être d’un ivoire luisant, rattrape une autre parenté. Il ressemble à s’y méprendre au beau pain de sucre du pays.
Oh! L’odeur des premières vapeurs n’a rien de quoi en imprégner nos mouchoirs : mais la graisse, les résidus graisseux, les déchets gras sont déjà assez humiliés d’être ce qu’ils sont sans rappeler leur relent. L’air finira bien par tout absorber. D’ailleurs, ne cuit-on pas même les fleurs pour en extraire l’exquise essence du parfum? Si nous respirions, au moment de la cuisson, l’émanation des éléments chimiques mêlés à la rose, au jasmin, au lilas, etc., notre nausée suffirait à ruiner le commerce des parfumeries. Heureusement, on n’en sait rien, si ce n’est que la chimie a des mystères qu’il vaut mieux ne pas scruter pour que notre foi dans la fleur soit intacte.
Chimistes? Mais elles l’étaient elles aussi, nos grands-mères qui faisaient bouillonner les graisses pour en retirer le savon dont elles nous ont laissé le secret. Ne cuisaient-elles pas également dans l’eau des fontaines la luzerne qu’elles écrasaient ensuite et pétrissaient? Pour le savon de toilette, elles ajoutaient aux graisses épurées quelques gouttes de lavande, un peu de thym, de serpolet, de musc, de safran et parfois l’aloès qui préservait des puces. La cendre de bois fournissait aussi un excellent savonnage. Rien ne dément le fait que les connaissances de nos aïeules n’aient été un héritage des Gaulois mêmes, auquel on attribue le mérite d’avoir découvert la propriété d’un savon préparé avec de la cendre et le suif. Un peu plus tard, les élégantes du temps utilisaient, pour teindre leurs cheveux en blond, un savon domestique. Et un médecin du IVe siècle parle, dans ses mémoires, d’un savon noir fait au foyer et répandu jusque chez les Arabes, pour le service du blanchissage.
Savon domestique (savon du pays)
25 livres de matières grasses
04 livres de résine
04 livres de lessive caustique (caustic)
04 chaudières d’eau (chaudière de 20 livres)
2 à 3 livres de gros sel (cette quantité peut varier d’après la qualité des matières grasses employées).
Façon de procéder :
Mettre l’eau dans un chaudron de fer, la faire chauffer. Ajouter la lessive, la faire dissoudre et ajouter les matières grasses et la résine. Faire bouillir jusqu’à ce que le mélange fasse des fils en soulevant la palette de bois (qui sert à brasser) puis, ajouter lentement du sel (2 livres environ) en mettant le sel, le mélange caille, alors brasser lentement et parfaitement, laisser bouillir. La lessive vient alors à la surface et fait des petites bulles granulées. Ajouter encore peu à peu quelques poignées de sel. Brasser et laisser cuire jusqu’à ce que la lessive se répande claire sur toute la surface du savon (cette opération prend parfois une heure et même plus) le savon est alors cuit à point. Retirer immédiatement du feu et laisser refroidir. Il est bon de brasser lentement une couple de fois au début du refroidissement. Découper. Un beau morceau de savon a en dessous une surface appelée « écaille de poisson ».
On peut mettre 5 à 6 livres de résine et on obtiendra une plus grande quantité de savon.
Il sera plus foncé, mais très bon tout de même.
Pour un savon de toilette, ajouter à ces ingrédients une demi-tasse de glycérine et du parfum au goût.
À SUIVRE :Des soldats de l’armée canadienne fabriquent leurs savons domestiques.