
Quand vient décembre, hâtivement vous retirez de votre grand coffre de rotin, bougies, couronnes, boules de Noël, crèche et santons. Inconsciemment, vous entonnez les airs de Noël de votre enfance, dont celui des petits santons dormant dans leur boîte de carton.
Justement, repose dans sa boîte de carton, le Jésus de cire, œuvre de Juliette Chanel que vous avez offerte il y a des lunes, à « madame- fille», grand-mère de cinq et bientôt d’un sixième angelot-fille.
Cindy, votre madame-fille vous a confié son enfant Dieu afin de prendre rendez-vous à l’hôpital des Jésus éclopés après avoir constaté que l’une des minuscules jambes avait quitté l’autre et reposait béatement le long du divin petit corps, sans plus. Mystère! On ne connaîtra jamais les circonstances ou la cause de l’accident qui remonte à Noël 2016.
Il faut faire vite. Retrouver Sylvette Chanel et son hôpital de Jésus de cire, et lui confier l’enfant-roi pour une chirurgie d’urgence. Vous accompagnerez le trésor durant l’opération.

Une heure plus tard, vous ressortez de la « chapelle aux miracles», tenant en main l’enfant-roi remis à neuf. Oui! Oui! Vous avez bien lu «Chapelle » pour être habitée de statuts de toutes dimensions, de vénérables saints, d’angelots, d’anges, d’archanges en attente d’une reconstruction: ailes ou bras cassés, visages « amochés », défraîchis, qui s’amènent de partout, même d’Europe. De cire de plâtre, de bois. Des Jésus de plus de cent ans d’existence, d’autres au visage défiguré ou mordu par un animal de compagnie. Des Jésus aux proportions de crèches d’église, voire de cathédrale. Sans compter le nombre d’Enfants Jésus à produire d’ici un mois et livrer à temps pour Noël prochain.
Revêtue d’un sarrau blanc, c’est la chirurgienne-artiste qui vous éblouit par son doigté, son souci de perfection, son amour et sa passion pour la vocation qu’elle a choisi. Perpétuer, redonner un sens à ces immuables symboles d’espoir et d’allégresse.
Sylvette, l’illustre septuagénaire de 78 ans en janvier prochain, tantôt créateur, tantôt sculpteur ou modeleur est l’ange qui crée, raccommode, guérit, reconstruit de ses doigts de fée des centaines de Jésus, de figurines anciennes et de statuts en bois, en plâtre ou en cire, assurant du coup leur pérennité.
Au moment de quitter la Dame qui œuvre au coeur de ce petit monde silencieux dans un « chez elle » calme et serein, surgit en vous cette pensée, cent fois citée, rivée à votre mémoire: «Objets inanimés, auriez-vous donc une âme».
Joyeux mois de décembre à vous tous.
À propos de Sylvette Chanel et de l’histoire des Jésus de cire, déjà parus sur mon blog : voir Archives: Les gens de mon pays- 14-12-2007, les Jésus de cire et 05-02-2013 C’est ça la vie.